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Voici un cas intéressant d’exercice par un salarié de sa liberté d’expression sur les méthodes managériales de son employeur. Cette liberté est-elle suffisamment protectrice ?

Les faits

Le salarié est licencié pour insuffisance professionnelle. Il lui est reproché son refus d’accepter la politique de l’entreprise et de se conformer aux modalités de fonctionnement basées sur des équipes de petite taille au sein desquelles la coopération par des échanges fréquents est valorisée et sur le partage des valeurs « fun » et « pro » par tous les salariés de l’entreprise, décrites notamment sur le site internet de la société sur la participation à la célébration des succès, la présence au séminaire annuel Saint-Palais et le partage de ses passions personnelles (cube Cubik). La valeur « fun & pro » de l’entreprise se traduisait par la nécessaire participation aux séminaires et aux pots de fin de semaine générant fréquemment une alcoolisation excessive encouragée par les associés qui mettaient à disposition de très grandes quantités d’alcool, et par des pratiques prônées par les associés liant promiscuité, brimades et incitation à divers excès et dérapages. Sont également reprochés au salarié sa rigidité, son manque d’écoute, son ton parfois cassant et démotivant vis-à vis de ses subordonnés et son impossibilité d’accepter le point de vue des autres.

Le salarié fait grief à l’arrêt de rejeter sa demande tendant à prononcer la nullité du licenciement, ordonner sa réintégration et condamner l’employeur à lui payer une certaine somme à titre d’indemnité, alors qu’est nul comme portant atteinte à une liberté fondamentale constitutionnellement garantie le licenciement intervenu à raison de l’exercice par le salarié de sa liberté d’expression.

Selon lui, la cour d’appel a violé les articles les articles 1er et 5 du Préambule de la Constitution du 27 octobre 1946, l’article 11 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789, l’article 11 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne du 7 décembre 2000, l’article 10 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ainsi que les articles L. 1121-1 et L. 1232-1 du code du travail.

Le droit

La haute cour lui donne raison et confirme le caractère illicite du motif du licenciement prononcé, même en partie, en raison de l’exercice, par le salarié, de sa liberté d’expression, liberté fondamentale, motif qui entraîne à lui seul la nullité du licenciement.

Ayant constaté que le licenciement était, en partie, fondé sur le comportement critique du salarié et son refus d’accepter la politique de l’entreprise basée sur le partage de la valeur « fun and pro » mais aussi l’incitation à divers excès, qui participent de sa liberté d’expression et d’opinion, sans qu’un abus dans l’exercice de cette liberté ne soit caractérisé, la cour d’appel ne pouvait pas le débouter de sa demande d’annulation du licenciement.

Cass. soc. 9-11-2022 n° 21-15.208 F-D

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